Total-Retour aux actionnaires et bas coûts justifieraient un rebond

* Total suit le mouvement sur les dividendes et rachats d’actions
* Le titre surperforme le secteur depuis début 2018
* Une réserve de hausse liée aussi aux coûts et à la production
* La tenue des prix du pétrole sera déterminante

par Benjamin Mallet
PARIS, 4 avril (Reuters)

Il faut un catalyseur, que le marché commence à reconnaître que la société a bien fait son travail et qu’elle peut bénéficier un maximum de la remontée des prix du pétrole. Peut-être faut-il encore un ou deux trimestres de résultats avant que ce soit validé”, estime Ion-Marc Valahu, gérant de fonds chez Clairinvest, qui détient des titres Total (2,5% of son portefeuille).

La nouvelle politique de retour aux actionnaires de Total TOTF.PA et ses efforts en matière de réductions de coûts justifieraient un rebond en Bourse du groupe français dans un contexte de prix du pétrole relativement fermes, selon des analystes et des gérants interrogés par Reuters.

Deuxième compagnie pétrolière européenne par la capitalisation boursière derrière le britannique Royal Dutch Shell RDSa.L, Total a annoncé en février une hausse de son dividende de 10% sur trois ans, jusqu’à cinq milliards de dollars de rachats d’actions sur la période 2018-2020, et son intention de neutraliser l’effet dilutif de l’option maintenue d’un dividende en titres.

Total a ainsi été parmi les dernières majors européennesavec l’italien Eni ENI.MIà concrétiser des mesures
attendues de longue date par les investisseurs, envoyant au marché le signal d’une volonté de partager la hausse des cours
du pétrole avec ses actionnaires alors qu’il bénéficie désormais d’une forte visibilité sur la progression de ses flux de
trésorerie.

L’action du groupe français affiche depuis une hausse modeste mais elle fait mieux que le secteur en Europe et
surperforme les géants américains du secteur Exxon Mobil Corp XOM.Nqui a déçu sur le front des rachats de titres début
marset Chevron CVX.N .

Total a pris le temps de savoir où allait le prix du pétrole avant d’annoncer une hausse prudente du dividende (…),
combinée avec un programme de rachat d’actions (…) qui pourrait être dépassé à condition que le prix du pétrole reste
au-dessus de 60 dollars”, estime Ahmed Ben Salem, analyste chez Oddo Securities, à l’achat sur le titre avec un objectif de
cours de 56 euros.

Et si le prix du pétrole monte trop, Total va privilégier le retour aux actionnaires plutôt que de se lancer dans des
acquisitions hasardeuses”, ajoute-t-il.

Total semble aussi disposer d’une réserve de revalorisation liée à son programme d’économies et à la croissance de sa
production.

Le groupe a réduit ses coûts de production à un niveau de 5,4 dollars par baril en 2017 contre 9,9 dollars en 2014. Il
souhaite ainsi continuer à baisser son point mort organique avant dividendec’est-à-dire le seuil à partir duquel le prix
du baril lui permet de générer un flux de trésorerie égal à ses investissements organiquespour le ramener à 25 dollars en 2018 (contre 27 dollars en 2017).

Il a en outre profité de la baisse des cours pour acquérir des réserves pétrolières à bas prix ou à bas coûts, notamment en
mer du Nord avec le rachat de Maersk Oil, consolidant ainsi les perspectives de croissance de sa production.

La croissance de la production devrait dépasser significativement celles des concurrents au cours des trois
prochaines années et provenir de projets à forte visibilité et avec des marges de trésorerie nettement meilleures. Les mesures de restructuration et la hausse des flux de trésorerie disponible devraient entraîner des retours en cash plus élevés”, selon les analystes de Cowen.

Pour autant, le marché continue d’appliquer à Total une décote assez nette par rapport à ses concurrents, l’action se
négociant 11,8 fois le bénéfice prévisionnel à douze mois contre 13,2 pour Shell, 14,6 pour BP BP.L et 15,2 pour Eni.

Il faut un catalyseur, que le marché commence à reconnaître que la société a bien fait son travail et qu’elle peut
bénéficier un maximum de la remontée des prix du pétrole. Peut-être faut-il encore un ou deux trimestres de résultats
avant que ce soit validé”, estime Ion-Marc Valahu, gérant de fonds chez Clairinvest, qui détient des titres Total (2,5% of
son portefeuille).

Ahmed Ben Salem estime lui aussi que, sous la direction du PDG Patrick Pouyanné, Total “est en train de faire beaucoup de
progrès en termes opérationnels, ce qui n’est pas bien reflété dans le titre”.

Reste que la revalorisation de Total dépendra in fine de la tenue des prix du pétrole, le groupe ayant augmenté sa
sensibilité cash aux variations du Brent à un niveau prévu de 2,8 milliards de dollars pour 10 dollars de variation du baril en 2018, contre 2,5 milliards en 2017.

Et si l’accord de réduction de la production des membres de l’Opep et des pays extérieurs au cartel a permis au baril de
brut de remonter à environ 70 dollars LCOc1 après avoir plongé de 110 to 30 dollars entre 2014 and 2016, les valeurs pétrolières n’ont pour le moment pas profité de ce rebond spectaculaire.

Le secteur ne suit pas du tout l’évolution des prix du pétrole, c’est à croire que tout le monde pense que ça ne peut
pas durer et que les cours ne peuvent pas tenir à des niveaux aussi hauts”, estime Ion-Marc Valahu.

Pour l’instant, il manque un ‘switchdes investisseurs des valeurs de croissance vers des valeurs un peu plus défensives,
et aussi la conviction que le pétrole est à des niveaux pérennes”, ajoute le gérant, tout en soulignant que Total subit
aussi une décote liée à la comptabilisation de ses résultats en euros dans un contexte d’affaiblissement prolongé du dollar.